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Pourquoi les médecins du Moyen-Orient, du Maghreb et des pays de l’Est émigrent vers l’Europe?

Medecin-euromed2bSyriens, Libanais, Marocains, Roumains… Qui sont ces médecins qui décident de plier bagages et d’exercer en Europe ? Quelles sont leurs motivations ? Comment les pays qui assistent à cette fuite des cerveaux peuvent-ils tirer parti de cette expatriation ? FEMISE apporte des réponses à ces questions dans un rapport de recherche qui vient d’être publié sur le site FEMISE (FEM34-07).

L’attrait d’une vie meilleure, de conditions de vie satisfaisantes, d’un bon salaire, un système éducatif évolué, la proximité avec le pays d’origine… Autant de paramètres pouvant motiver des médecins du Moyen-Orient, du Maghreb et des pays de l’Est à exercer la médecine en Europe. « Les candidats au départ sont attirés par les avantages relatifs offerts par les pays de l’Union Européenne. Gagner plus leur permet d’être à l’aise et de vivre mieux. Il faut également considérer les avantages non pécuniaires, la possibilité d’évoluer professionnellement et de faire carrière », souligne Ahmed Driouchi, Professeur d’Economie à l’université Al Akhawayn, à Ifrane, au Maroc, auteur du rapport Femise.

Intitulée « Qu’apprenons nous de la nouvelle économie de l’émigration des docteurs en médecine vers l’UE : Les cas d’Europe centrale et d’Europe de l’Est, du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord », l’étude du Femise pointe du doigt une émigration à deux vitesses.

Les médecins issus du Moyen-Orient et du Maghreb ne bénéficient pas souvent d’un système d’équivalence. A leur arrivée en Europe, ils pourraient occuper des postes de moindre importance en attendant de passer les équivalences et les tests d’admission. L’entrée dans l’Union Européenne des pays de l’Est entre 2002 et 2007 a accru le champ de la mobilité en garantissant la portabilité des qualifications des professions de santé. Cette reconnaissance des diplômes de médecins, dentistes, infirmiers et autres professions de santé favorise l’émigration.

Des médecins dans les régions françaises

C’est ainsi que des médecins Roumains s’installent dans la plupart des régions françaises. Bien souvent les médecins issus des pays francophones optent pour la France ou la Belgique. Leurs homologues anglophones sont davantage attirés par la Grande-Bretagne. Après une période d’adaptation, leurs capacités intellectuelles leur permettent de s’intégrer.

Les taux d’émigration des médecins sont très élevés au Liban (19,6%) et en Syrie (17,5%). En Jordanie ils atteignent 9,9%, en Algérie 7,1%, au Maroc 6,6% et en Égypte 5,6%. Le Maroc a d’ailleurs fait l’objet d’une étude approfondie. Les chercheurs du Femise expliquent, au fil des 400 pages de l’étude, qu’il existe pour chaque pays un seuil de migration à ne pas dépasser pour éviter l’écueil de la fuite des cerveaux.

« Nous avons questionné les médecins marocains qui avaient choisi de rester dans leur pays. L’étude confirme des variables comportementales. Tout dépend de la situation personnelle des individus et de leur stratégie. Le modèle empirique démontre les avantages relatifs par les pays de destination», conclut le professeur Ahmed Driouchi.

Illustration Femise

Article de Nathalie Bureau du Colombier, Econostrum. L’article fait partie d’une série d’articles conjoints réalisés dans le cadre d’un partenariat entre Femise et Econostrum pour l’année 2012, qui alimentent également la rubrique « Grand Angle»  du site d’information Econostrum. Vous pouvez retrouver cette rubrique et toutes les informations à l’adresse suivante: www.econostrum.info. L’inscription à la newsletter d’econostrum est accessible par: http://www.econostrum.info/subscription/

Repenser la migration des médecins

adriouchyContrairement aux idées reçues, la migration des médecins des pays du Moyen-Orient et du Maghreb vers l’Europe ne bénéficie pas seulement aux pays d’accueil. Les pays sources tirent également parti de ces départs. Le renforcement des relations Nord-Sud dans les domaines de l’éducation et de la recherche médicales permettrait de parvenir à un schéma gagnant-gagnant.

Dans le sillage du rapport de l’Organisation mondiale de la santé de 2006, le Femise vient de publier un rapport sur l’émigration des médecins des pays du Moyen-Orient et du Maghreb vers l’Europe. Intitulé «Que peut-on apprendre de l’émigration des docteurs en médecine dans l’Union européenne : Les cas d’économies d’Europe centrale et est, du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord ?», le rapport de recherche livre une nouvelle approche des rapports Nord-Sud, jetant les bases d’une coopération basée sur l’économie et la politique sociale (voir FEM34-07 sur le site du FEMISE).

D’un côté, une Europe vieillissante en mal de médecins en particulier dans les campagnes et de l’autre des médecins formés au Moyen-Orient et du Maghreb qui aspirent à une vie meilleure. Les pays développés ne sont pas les seuls à tirer avantage de l’exode des cerveaux médicaux. Ce brassage peut produire un effet levier sur le système éducatif des pays sources.

Une nouvelle ère s’ouvre, les relations entre l’UE et les pays MENA sont repensées avec un renforcement de la coopération

« La nouvelle économie de la migration développe une approche dans laquelle le départ des travailleurs qualifiés n’est pas systématiquement générateur de fuite des cerveaux. Cela signifie d’une part que l’enseignement est apprécié ailleurs et que les médecins une fois installés en Europe ont la possibilité d’envisager de s’associer à un hôpital ou une faculté de médecine d’un pays du Sud, créant ainsi une mobilité circulaire. En parallèle, des médecins occidentaux peuvent souhaiter se rendre quelques mois dans un pays du Sud et rentrer en Europe. Ces mouvements contribuent ainsi à améliorer la Recherche. Cette question est insuffisamment développée dans les accords bilatéraux avec l’Europe », remarque Ahmed Driouchi, Professeur d’Économie à l’université Al Akhawayn au Maroc et auteur de ce rapport FEMISE.

La Méditerranée ne constitue pas une frontière étanche, en particulier dans le secteur de la médecine. L’Organisation mondiale du Commerce encourage le commerce international des services y compris dans le domaine de la santé. « Une nouvelle ère s’ouvre, les relations entre l’UE et les pays MENA sont repensées avec un renforcement de la coopération entre pays, entre hôpitaux », ajoute Ahmed Driouchi.

La collaboration peut se faire à travers des publications. Les pays européens bénéficient également de l’exportation de leurs technologies, de leur savoir-faire et de la coopération avec les institutions étrangères. Des flux d’échanges vont se créer.

« Les pays d’origine et de destinations accusent un déficit en médecins, mais le marché est ouvert. S’ils veulent convaincre les médecins d’exercer dans leur pays d’origine, les pays du sud devront coûte que coûte augmenter les salaires et avantages et mettre en place une véritable politique d’attractivité. Cela passe également par l’amélioration des conditions générales à savoir une vraie démocratie et une condition de vie améliorée », ajoute le Professeur Ahmed Driouchi.

Photo : D.R.

Article de Nathalie Bureau du Colombier, Econostrum. L’article fait partie d’une série d’articles conjoints réalisés dans le cadre d’un partenariat entre Femise et Econostrum pour l’année 2012, qui alimentent également la rubrique « Grand Angle»  du site d’information Econostrum. Vous pouvez retrouver cette rubrique et toutes les informations à l’adresse suivante : www.econostrum.info. L’inscription à la newsletter d’econostrum est accessible par : http://www.econostrum.info/subscription/