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Convergence des revenus et impact de l’intégration commerciale et financière EU-Med sur la volatilité macro

Les efforts d’intégration économique et financière entre les pays Partenaires Méditerranéens (MPs) et l’Union Européenne (EU) ont été initialement introduits par les accords de coopération qui garantissaient une exemption totale de tarifs douaniers sur les produits industriels. Ces efforts ont ensuite été consolidés par les Accords d’association introduits dans le cadre de la déclaration de Barcelone en 1995, qui ont eu pour effets de réduire ou éliminer les droits de douanes sur les importations industrielles européennes. Parallèlement, les MPs se sont considérablement ouverts aux autres pays, que ce soit dans le cadre des accords commerciaux euro-méditerranéens (MED) ou dans le contexte d’une réduction élargie des droits de douanes via les accords signés avec l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC). Au début des années 2000, le processus de Barcelone fut remplacé par la politique européenne de voisinage (PEV) qui fut modifiée en 2015 et devient la nouvelle politique de voisinage. C’est dans ce cadre que les relations économiques entre l’Union Européenne et ces partenaires méditerranéens sont désormais redéfinies.

La nouvelle politique de voisinage offre une plateforme solide d’assistance financière par une intégration financière plus poussée, un meilleur accès au marché commun, et une amélioration de l’institutionnalisation des relations commerciales et financières. L’Union Européenne propose également un accord de libre-échange complet et approfondi (ALECA) concernant l’agriculture, les services et les mesures non tarifaires. Les négociations pour l’ALECA sont en cours avec le Maroc et la Tunisie. Dans le cadre de cette nouvelle politique européenne de voisinage et du rôle facilitateur de l’Union Européenne pour la modernisation, la transition et l’ouverture internationale des pays Méditerranéens, cette étude évalue le degré de convergence des économies résultant de ces accords commerciaux entre deux groupes de pays (EU et MED). Nous utilisons dans un premier temps les concepts de s-convergence et b-convergence pour une évaluation empirique du phénomène de convergence économique parmi ces pays sur la période 1980-2015. Nous présentons ensuite une analyse approfondie des implications des accords de partenariats Euro-MED sur la croissance économique et la volatilité macroéconomique dans un échantillon de pays méditerranéens (MPs). Afin de tenir compte à la fois du lancement du processus de Barcelone et de la politique de voisinage en 2000, l’analyse empirique est traitée de façon séquentielle sur des périodes de 5 et 10 ans, puis sur l’ensemble de la période 1980-2015.

Les résultats empiriques montrent une évidence faible de convergence des économies pour le groupe de pays EU-MED analysé à intervalles partiels de 5 ou 10 ans de 1980 à 2000 dans une régression de type transversale. Toutefois, nous avons trouvé un résultat statistiquement significatif de convergence du PIB par tête, que l’analyse porte sur l’ensemble de la période 1980-2015 ou sur des sous périodes de 10 ans regroupées et estimées en données de panel par régressions de croissance. Ces résultats sont plus probants, puisque la croissance économique et la convergence sont tous deux des phénomènes de long terme et que les méthodes d’analyse en données de panel donnent de meilleures estimations. Sur la période 1980-2000, nous trouvons une évidence faible de convergence conditionnelle dans le groupe de pays EU-MED (16), et cette évidence est encore plus faible pour le groupe de pays MED de 2000 à 2015. Ces résultats s’expliquent par les effets négatifs de la crise financière et de la crise de la dette en Europe sur la région Euro-MED en générale et sur la région MED en particulier. La stabilité macroéconomique et l’ouverture économique se sont avérées être des facteurs statistiquement importants et ont l’effet positif attendu sur la croissance économique dans les pays MED. Effectivement, dans la majorité des modèles estimés, la variable qui est systématiquement la plus significative est l’ouverture commerciale. Parmi les autres variables, la croissance de la population a l’effet théorique négatif attendu sur la croissance économique, comme trouvé dans d’autres études empiriques sur la croissance. Les dépenses du gouvernement ont également un effet négatif sur la croissance économique et cette variable est statistiquement significative tout comme l’est la croissance de la population.

Les principales implications politiques qui se dégagent des résultats empiriques de cette étude sont que les pays MED, s’ils souhaitent atteindre une croissance économique élevée, doivent poursuivre des politiques promouvant encore davantage le libre-échange et l’ouverture économique avec l’UE, tout en assurant une stabilité macroéconomique au moyen de politiques qui garantissent le contrôle des politiques fiscales et monétaires. Aussi bien l’agitation politique et sociale, que la crise financière et la crise de la dette ont un effet négatif sur la croissance économique et la convergence dans la région, et doivent être traitées si possible prioritairement par le biais d’actions politiques et de politiques macroéconomiques appropriées. D’autres résultats empiriques montrent que les pays MED seraient moins affectés par les chocs financiers provenant de l’UE, si le marché domestique MED était plus grand et/ou mieux régulé. Ceci est en cohérence avec ce que suggère la théorie économique et a des implications politiques. En fait, certains pays MED ont choisi d’imposer un contrôle du capital pour gérer les crises du marché financier puisqu’il semble que les « coupables » soient les flux de capitaux internationaux, et ce, malgré les conséquences économiques indésirables sur le long terme de ces pratiques politiques. Nous avons montré que les pays MED doivent améliorer la coordination de leurs politiques macroéconomiques et financières pour relever plus efficacement le défi d’une plus grande intégration commerciale et financière avec l’UE. Cet objectif peut par exemple être atteint en renforçant l’intégration économique et financière régionale. La création d’une zone de libre échange MED n’aurait pas pour seul effet de stimuler et de renforcer la croissance, mais pourrait également renforcer le commerce intra-MED, réduisant ainsi considérablement l’exposition aux cycles économiques européens, tout en contrôlant les expositions excessives de ces petites économies ouvertes (MED) aux développements macroéconomiques de l’Union Européenne.

La littérature établie que les plus grandes économies ont une meilleure capacité d’absorption et de neutralisation quant aux effets négatifs des chocs externes. Contrôler leurs effets reste toutefois une tâche beaucoup plus délicate qu’il n’y parait lorsqu’il s’agit de pays MED en développement, qui sont de plus petite taille, n’exportent que peu de produits sur le marché européen et dépendent d’un très grand nombre de produits d’importations européennes. Une conséquence directe d’un marché des capitaux intégré au sein de la région MED serait de diminuer les risques associés à une plus grande intégration EU-MED, ainsi que de rendre les MPs moins vulnérables aux fluctuations des taux d’intérêts des pays de l’UE, en particulier pour ceux ayant un niveau de dette élevé, comme le Liban, la Jordanie et l’Egypte. Un plus grand marché financier MED donnerait la possibilité de baisser les coûts de financement, et de rembourser leurs dettes importantes des gouvernements MED à moindre coût. D’autre part les entreprises MED pourraient s’appuyer plus sur le marché local que sur le marché de l’UE pour la levée de capitaux. La baisse du coût de la mobilisation des capitaux peut ensuite se traduire par plus d’investissements, de consommation et une augmentation des taux croissance économique dans la région. La région MED doit accélérer le processus d’intégration commerciale, financière et économique avec l’UE pour une meilleure absorption des effets négatifs liés aux politiques externes, financières et/ou aux chocs économiques. Il faudrait redoubler d’efforts pour accélérer la mise en place de réformes fiscales et monétaires afin d’améliorer l’entrée de nouveaux investissements de portefeuille et d’IDE dans la région.

En résumé, pour plus d’intégration commerciale et financière avec l’UE, les MPs doivent consacrer davantage d’efforts individuels pour mener des politiques macroéconomiques saines. A ces mesures, devront s’ajouter des réformes institutionnelles de soutien au développement du secteur financier dans les économies MED en question. Ensuite, les MPs devront essayer de s’intégrer horizontalement tout en s’ouvrant plus verticalement (à l’UE). Il a été montré que l’ouverture financière, mesurée par le rapport formation brute de capital/PIB, est associée à une augmentation de la volatilité de la consommation, contrairement à la notion établie d’opportunité de partage des risques internationaux via l’intégration financière. L’environnement macroéconomique et politique de nature instable et les conflits militaires, ainsi que les politiques fiscales et monétaires inappropriées dans la région MED peuvent expliquer cette irrégularité empirique. Une recommandation politique de cette étude est que les MPs ont besoin d’être plus, et non pas moins, intégrés avec le marché financier de l’UE pour pouvoir tirer avantage de l’intégration financière en termes d’amélioration du partage des risques, et de stabiliser la consommation. Cette conclusion peut toutefois nécessiter une analyse plus poussée, puisqu’il faut considérer que l’intégration financière régionale est également associée à divers risques dans la région EU-MED. Pour minimiser ces risques, les MPs devront mettre en œuvre des cadres macro-économiques et structurels sains en tandem avec une plus grande intégration. Par exemple, nos résultats ont mis en évidence le rôle clé des politiques fiscales et monétaires saines pour mieux contrôler la volatilité macroéconomique. Concernant les réformes structurelles, il s’agit de développer le secteur financier intérieur, puisqu’un haut degré de développement du secteur financier est associé à une diminution de la volatilité macroéconomique.

Finalement, la nouvelle politique européenne de voisinage offre une plateforme solide d’assistance commerciale et financière par une intégration financière plus poussée, un meilleur accès au marché commun et une meilleure institutionnalisation des relations commerciales et financières entre les pays MED et de l’UE. Ce projet de recherche aidera les décideurs politiques et les chercheurs académiques dans la région Euro-méditerranéen, à redéfinir leurs priorités en matière de commerce, de finance et de macroéconomie lors de l’élaboration de nouvelles politiques de voisinage européennes qui doivent répondre aux défis économiques actuels. La nouvelle politique de voisinage européenne va produire un volume important de littérature sur ces conséquences. Cette étude fait partie intégrante de cette littérature en identifiant les points communs et les différences entre les composantes de cette analyse, en mettant un accent particulier sur les changements de paradigme concernant la politique macroéconomique dans les pays MED et l’UE.

Inégalité et croissance inclusive : l’éducation et l’innovation favorisent-elles la performance des entreprises et le bien-être ?

FEMISE a le plaisir d’annoncer la publication de son projet de recherche FEM42-10, «Inégalité et croissance inclusive dans la région sud méditerranéenne: les activités d’éducation et d’innovation favorisent-elles la performance des entreprises et le bien-être des citoyens?”

Le projet de recherche a été coordonné par Inmaculada Martinez-Zarzoso (Université Jaume I et Université de Göttingen) et comprend les trois articles suivants:

Les Rendements de l’Enseignement Professionnel et Universitaire en Egypte

Alors que les compétences tertiaires sont importantes pour la croissance dans les pays développés, ce sont l’enseignement primaire et secondaire qui sont liés au développement dans les pays en développement. Malgré l’expansion substantielle de l’enseignement technique et professionnel en Égypte, le marché du travail manque de techniciens qualifiés non seulement en nombre mais aussi en termes de compétences. Cet article examine l’impact de l’éducation sur les résultats du marché du travail égyptien, en mettant l’accent sur les rendements de l’enseignement secondaire professionnel et technique en 1998, 2006 et 2012. Nous fournissons des estimations des taux de rendement progressif de l’éducation basés sur des équations de gains corrigées du biais de selection (selectivity corrected earnings equations) et des régressions quantiles qui renforcent l’idée que l’enseignement technique a généralement réduit les inégalités en Egypte. La principale implication politique de l’analyse de ce document est que la qualité de l’enseignement professionnel et sa pertinence sur le marché du travail demeurent la clé d’une réforme efficace. Encourager les entreprises privées à investir dans l’enseignement professionnel sera peu utile si les apprentis sont toujours confrontés à la stigmatisation sociale qui les relègue à des emplois mal rémunérés. Par conséquent, une recommandation politique serait de concevoir des mesures gouvernementales pour améliorer «l’image» de l’enseignement professionnel en Egypte

Écart entre les sexes et Performance des Entreprises dans les Pays en Développement

Ce document utilise des données au niveau des entreprises issues de l’Enquêtes sur les Entreprises de la Banque Mondiale (WBES) pour étudier les écarts de productivité entre les entreprises gérées par des hommes et des femmes dans les pays en développement et comparer les résultats obtenus dans différentes régions du monde. Nous nous distinguons de la littérature précédente en utilisant comme variable cible le genre du top manager, variable nouvellement disponible dans la version 2016 du WBES. Les principaux résultats indiquent qu’il est crucial de faire la distinction entre la gestion féminine et la propriété feminine d’une entreprise, ainsi que la jonction entre les deux. Nous constatons que lorsque les entreprises sont gérées par des femmes et qu’il n’y a pas de femmes propriétaires, ells affichent une productivité moyenne du travail et une PTF plus élevées. Cependant, si des femmes font parties des propriétaires et qu’une femme est le dirigeant principal, alors leur productivité est inférieure à celle des autres entreprises. Ces résultats sont très hétérogènes entre les régions. En particulier, les résultats en Afrique du Sud, en Asie de l’Est et en Asie du Sud semblent conduire aux résultats généraux, tandis qu’en Amérique latine, en Europe de l’Est et en Asie centrale, la participation des femmes à la propriété semble être négativement liée à la performance des entreprises.

Convergence réelle entre la PEV et les pays d’Europe du Sud : une analyse par grappe

Cet article analyse le modèle de convergence du PIB par habitant, de la productivité, de l’inégalité et du chômage dans les pays de la PEV et d’Europe du Sud (SE). Il suit la méthodologie proposée par Phillips et Sul (2007, 2009) dans laquelle différents chemins de convergence peuvent être distingués parmi les économies hétérogènes impliquées dans un processus de convergence. Cette hétérogénéité est modélisée à l’aide d’un modèle non linéaire à facteurs variant dans le temps (nonlinear time varying factor model) qui offre une flexibilité dans l’étude des comportements idiosyncratiques au cours du temps et d’une section à l’autre. Les principaux résultats de l’analyse de la convergence montrent que s’il existe une convergence du chômage, du PIB par habitant et de la productivité entre les pays de l’UE et de la PEV, mais aucune convergence n’est constatée concernant les inégalités. Parmi les défis d’un voisinage en évolution, le développement économique inclusif devrait être inclus dans la nouvelle approche de la PEV.